Entrée dans la Taïga

Enfin, le pont s'achevait, laissant place à la terre.
La forêt de connifères aux rares feuillus commençait là. Carmina eut un soupire: pour ce qui allait être des plantes, si elle avait tout ce qu'elle souhaitait en pins, sapins, épicéas, mélèzes et autres arbres capables de survivre, il y avait peu d'herbes et de plantes: le sol était évidement trop acide, à cause du froid et des conifères (en revanche, l'eau du fleuve devait être particulièrement riche en minéraux, pour les mêmes raisons).
Les arbres étaient gigantesques, le calme des lieux équivalent.
Elle songea non sans amusement qu'il devait y avoir pas mal de loups dans les parages...et son regard se posa sur l'ex prêtre de Dana...L'envie de lui en faire la remarque la demangeait, mais elle n'y avait pas vraiment le coeur.
Elle se sentait emprunte de mélancolie, presque malgré elle. Un mélancolie douce et apaisante, certe, mais une mélancolie tout de même.

Tran'k suivit sa meilleure amie qui avait déjà pris de l'avance par rapport au groupe. Remarquant son regard emplis d'une certaine nostalgie, il se contenta de marcher à ses côtés, en silence.
La Taïga semblait incroyablement vide, mis à part quelques rares bruits, craquements insolites, cri d'un quelconque oiseau qui s'élevait brusquement dans le ciel. Comme le calme avant la tempête. Une impression qui ressemblait étrangement à celle qui l'avait étreint, cinq cents ans plus tôt alors qu'il se trouvait sur les plaines de Petralk, en première ligne. Les quelques secondes qui avaient précédés l'assaut avait été effroyablement silencieuses et pesantes. Puis tout avait éclaté.
Non, il n'aimait pas ce genre d'atmosphère.
Pourtant il garda pour lui son ressentie et examina plutôt le givre qui s'emparait des pointes des aiguilles des connifères, couvrait quelques peu les troncs. Plus ils avancaient, et plus la glace était présente. La température elle aussi avait sérieusement chuté.
Tran'k eut un soupir dont le souffle se dessina peu à peu sous la forme d'une infime buée claire. Il eut une pensée pour le poil chaud et dru de Lulu tout en resserrant sa cape.
Il devrait s'en passer.

Louxira sentait que Carmina et Tran'k Eter n'était pas totalement bien, ils se posaient sûrement certaines questions, comme elle ...
En effet, elle avait remarqué un étrange silence, un silence un peu trop pesant à son gout. Au fond elle se disait :
- Je n'aime pas ça ...

Elle remarqua encore quelque chose, plus ils avançaient dans la taïga, plus le givre recouvrait les sapins, pointes des aiguilles des connifères et autres arbres. Le froid se faisait de plus en plus important à mesure qu'ils s'approchaient de ... Mais de quoi en fait ? Cette fois, les plaines enneigés approchaient et sa elle en était sur !

La démone eut un léger frisson. Elle ressentait elle aussi l'atmosphère pesant que dégageait la taïga. Personne ne disait rien. De sa hauteur, elle pouvait voir les plaines enneigées qu'ils devraient bientôt affronter. Ils quitteraient bientôt la féérie de la taïga pour se plonger dans ce terrible froid. Elle regarda en dessous d'elle. Ses compagnons ne pipaient mot. Elle regarda alors son petit Splach, emmitoufflé dans son écharpe puis tourna la tête en direction d'Avalon. Elle pouvait voir, au loin, le château de sa déesse s'effacer au fur et à mesure qu'ils avancaient. Elle redescendit alors en piquet vers ses compagnons afin de laisser se reposer ses longues ailes.

Carmina sentait un danger...Quelque chose les surveillait. Quelque chose qui allait leur sauter dessus.
Elle ferma les yeux pour éveiller ses autres sens...Un bruissement d'air imperceptible la fit se plaquer à terre en sautant sur la démone qui n'avait rien vu venir.
Là où Midnight se tenait uen seconde plus tôt, une grosse boule de plumes, de cros et de griffes venait d'atterrir, se receptionnant en silence.
Aussitôt, l'effet de surprise étant raté, douze autres créatures semblables venaient de faire leur apparition de derrière et dessus les arbres, les encerclant.
Carmina sortit son arc.

_Et bien, fit-elle simplement, je crois que nous allons enfin nous amuser un peu...

Tran'k avait froncé les sourcils, se figeant sur lui-même, en plein milieu du sentier qu'ils empruntaient, bordé d'arbres blanchis par le froid. Le Commandant
n'émit aucun geste, mais ses yeux parcoururent rapidement les lieux, à
la recherche d'une quelconque présence...furtive. Mortelle.
Reprenant
finalement sa marche, le blond posa une main certaine sur la poignée de
son Mizuchi. Croisant le regard de Carmina, il comprit qu'elle aussi avait ressentit les nombreuses présences qui les entouraient. Ses sens aux aguets, il ressentait pleinement la légère
nervosité du groupe.
Et le bruit mou d'une masse imposante.

Se retournant vivement, il fit face au fauve immense qui venait d'apparaître ainsi que ses congénères. Dégainant son katana avec rapidité pour esquiver une première attaque d'un des nombreux animaux, il se retourna, et planta son arme dans le cou dans un jaillissement de sang qui fit grogner l'animal. Cependant celui-ci semblait résistant à l'attaque. Il se contenta de reculer, la gueule ouverte sur de fabuleux crocs, ses plumes hérissés.

Tran'k n'avait jamais rencontré pareille animal. Il lui rappelait les Runedels
en un peu plus imposant et fort. Cette dernière perspective étira un
léger sourire sur ses lèvres. Mais ses yeux ne souriaient pas du tout,
ils n'étaient que promesses de mise à mort.

"Oui... On va bien s'amuser..."

Le félin avait déjà bondit à une rapidité mortelle.
Du moins... Pas pour Tran'k qui l'évita d'un roulé-boulé avant de prendre
appui sur une de ses mains pour se remettre debout dans son élan.
Enflammant au passage Mizuchi, il se retrouva dans le dos de l'animal
dont il ouvrit le flanc d'un coup de lame. Ce qui lui permit
d'apprendre que la bête de type plutôt glace, n'appréciait pas -mais
alors pas du tout- le feu. Une bonne chose pour le Commandant.
Profitant d'une nouvelle attaque, il replanta son arme enflammée dans le dos du félin qui, toujours aussi résistant, n'émit qu'un grognement. Sa
vitesse s'était cependant affaiblit et bien que Tran'k est dû
abandonner son arme toujours encrée dans la chair du fauve, cela ne
sembla pas le déranger. Au contraire, sautant au-dessus de la créature
qui attaquait à nouveau, il attrapa son Kozuka dissimulé dans sa manche
et enfonça le petit poignard droit dans un dernier coup mortel.

Le félin glissa alors à terre dans un dernier grognement, le sol
commençant à prendre une légère teinte carmin. Le Commandant en profita
pour récupérer sa fidèle arme avant de s'accroupir au niveau de la bête
qu'il examina, effleurant notamment les plumes de l'animal. Etrange et
magnifique. Imposante et pourtant silencieuse. La bête était faite pour
tuer. Un prédateur intéressant.

"Hum... Pas mal, pas mal... Je situerai son niveau vers les 350. Rien de
plus..."

Tran'k se releva alors tranquillement, passant son Kozuka à sa ceinture, à côté de son Tanto, Mizuchi enflammée en main. Pour finalement faire face à
l'effervescence qui régnait maintenant sur le sentier, son sourire de fou furieux des combats reprenant peu à peu place sur son visage, son regard toujours aussi froid.

"On commence les comptes : 1 déjà !"

Son Tanto alla voler vers un autre félin, se plantant royalement dans la
carotide de celui-ci. Comme pour répondre à l'attaque, la créature
fonça sur le Commandant qui après avoir esquivé de nombreuses attaques,
la décapita sans remords.

"2 !"

Et avant qu'une autre bête ne lui saute dessus, il jeta un léger coup
d'oeil au reste de la bataille qui régnait maintenant sur le sentier.

Carmina l'ayant plaquée au sol pour la protéger, la démone était face contre terre. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, elle se remit debout et fit face à deux créatures. Celles-ci, montrant toutes dents dehors, se jettèrent tête baissée sur la jeune fille qui, heureusement pour elle, esquiva au dernier moment. Elle prit son envol, sortant ses dagues, et fonça en piquet sur les deux monstres. Ceux-ci, trop occupé à la chercher sur terre, ne la virent pas arriver, et elle put planter une de ses dagues dans la nuque d'une créature. Mais, comme elle sent doutait, la créature ne sentit quasiment rien. Elle remonta alors dans le ciel mais, au moment de refoncer sur les monstres, sa cape lâcha et son petit Splach, enveloppé dans son écharpe, tomba d'un bonne dizaine de mètres... sur la tête d'un des monstres.

La démone emit un soupir de soulagement. Heureusement que la tête de cette "horreur" avait amortie la chute de son petit compagnon ! Mais maintenant, c'était lui qui était en danger. Elle allait pour prendre son élan afin de se jeter sur les monstres, quand elle vit son Splach, posé sur la tête de la bestiole.

Mais qu'est ce qu'il fait ?

C'est après quelques secondes de questionnement que la démone trouva la réponse à sa question. Il effaçait la mémoire de la créature ! La démone ne savait pas quoi faire. Elle voyait le monstre en train de se débattre pour essayer d'enlever cette "chose" qu'il avait sur la tête. Puis, soudain, il se stoppa. Sans doute n'avait il plus de mémoire. La démone regarda la créature, préparant ses dagues s'il attaquerait. Mais, à sa grande surprise, le monstre, au lieu de se jeter sur elle ou sur l'un de ses compagnons, se rua sur l'un de ses confrères. Ayant perdu la mémoire, il ne savait plus qui étaient ses ennemis et qui étaient ses amis. Elle fonça alors sur la créature sans mémoire et arracha son Splach de sa tête.

C'est alors que commença une violente bagarre entre les deux monstres. Ils se sautaient dessus, se donnaient de violents coups. Et c'est après plusieurs minutes de carnage, que les deux monstres, terriblement affaiblis, tombèrent au sol. La démone en profita pour donner le coup de grâce et planta ses deux dagues dans la tête des monstres.
Un cri déchirant sortit de leurs gueules et il s'affaissèrent tout deux, morts.

"- Et de 2 ! Ca fait 4 !"

Louxira déguaina ses dagues, en face d'elle, deux créatures qui ne demandaient qu'à la tuer. Leurs dents imposantes te donnait un avant gout de se que tu allais devenir si tu perdais. Tout à coup, l'une des créatures se mit à l'attaquer, laissant ses crocs bien visible, elle esquiva de justesse mais pas de temps à perdre, l'autre arrivait ...

Elle attendit, attendit ... et d'un coup une marre de sang !! En effet, elle avait planté ses deux dagues dans la tête de cette créatures juste avant qu'il ne la dévore : mort presque immédiate ... La créature se relève quand même !
- C'est des balaises ses créatures là !!

Louxira réataque immédiatement pour ne pas laisser le temps à celle-ci de l'attaquer. Et hop, deux coups dans le dos en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire.
-Cette fois, la bête est morte ... enfin je pense.
- ...
- C'est pas possible, elle bouge encore !
Un dernier coup de dague dans le dos, un cri persant, cette fois la créature est KO.

- Ouf, je me suis bien battue !!
Elle rangea ses dagues. Tout à coup, elle entendit une branche craquée et un énorme grognement.
- Oh oh !! Je l'avais oublié celui-là.
Elle se retourna à toute vitesse pour regarder où il se trouvait et put s'appercevoir que ce n'était pas la deuxième créature quelle combattait qui avait grogner mais la créature que Midnight venait d'achever. elle déguaina ses dagues pour la deuxième fois et attendit qu'il arrive juste devant elle pour faire la même chose qu'à l'autre. Malheureusement, ayant compris la bêtise qu'avait fait son copain, il fonça sur elle plus l'evita et en passant la griffa sur le bras.

Louxira, très ennervée passa à l'attaque immédiatement et planta ses dagues dans le corps de l'animal, n'ayant pas put atteindre la tête. Horrible grognement, apparemment, elle avait frapper au bon endroit !

Pourtant cela ne suffisait pas, la créature se releva et attaqua immédiatement. Louxira eu le temps d'esquiver puis de lancer une de ses dagues dans le dos de l'animal, lequel ne s'y attendait pas.
- Toujours pas mort ...
Toujours pas morte mais très affaiblie, Louxira mit enfin le coup de grâce lorsqu'elle attaqua pour la dernière fois en lui plantant sa dague dans la tête. Cette fois-ci, elle était morte !

Elle reprit ses dagues toujours enfoncées dans le corps de cette horrible créature puis les rangea.
- Elle est très bien dans cette état non ?
Puis cria :
- Et 2 de plus, ca fait 6 !

Bien...treize moins six, il en restait sept!
Carmina, perchée dans un arbre, tirait sur deux de ces créatures qui l'avaient prises d'assault. Au bout d'une dizaine de flêche, la première créature rendit l'âme. Mais la deuxième, elle avait commencé à grimper sur l'arbre à toute vitesse.
La guerrière bondit dans l'arbre suivant, et une course poursuite d'arbre en arbre s'engagea.
Carmina, comprenant qu'elle était en train de se faire avoir, se retourna brusquement pour accueillir la bête qui allait lui aterrir dessus.
Le felin ne s'y attendant pas, elle bénéficia de l'effet de surprise pour planter deux coutelas dans son ventre et sa gorge en une seconde, puis la seconde d'après, lui balancer un violent coup de poing dans la gueule et un coup de pied à l'endroit où sa dague était plantée dans le ventre, enfonçant encore plus l'arme dans ce qui devait être le foi de la bête , ceci dans un bruit peu ragoûtant.
La créature, sous l'impulsion du coup de pied, vola en arrière, et, trop blessée pour réagir, ne put se receptionner lorsque le sol vint la cueillir dix mètres plus bas.
Elle gisait là, au pied de l'arbre, sur le dos, son regard vitreux fixant Carmina d'un air étonné, une marre de sang se répandant sous elle.

Déjà, Carmina passait à un autre adversaire: une des bestioles restantes venait de lui bondir dessus depuis un arbre voisin.
Carmina bondit dans les airs, passa au dessus de la bête qui aterrissait, se cramponna à ses oreilles, aterrit sur son dos, puis, à l'aide des deux coutelas qu'elle avait récupéré sur la carcasse, elle décapita son agresseur, faisant gicler le sang de ce dernier.
Le corps s'écroula en silence, et Carmina prit pied à terre, prête à passer à l'adversaire suivant.

_CESSEZ!
Carmina se retourna. Un elfe lui faisait face. Un elfe et toute sa troupe. Il étaient treize, eux aussi, comme les félins...se pouvait-il que...?
Elle s'accorda déjà un instant pour les analyser: C'était une race d'elfe qu'elle ne connaissait pas...pourtant...quelque chose chez eux lui était famillier.
Ce n'était pas les elfes des collines ou des forêts de son enfance. Ce n'était pas les hauts elfes de la faction de Dana.
Ces elfes là avaient des cheveux blancs, argent ou bleu foncé, des yeux de chat en amande gris/bleu, pour certains d'un bleu aussi pur que le ciel, et une peau d'une pâleur fantomatique.
Leur visages ressemblaient quelques peu à ceux des félins à plumes, avec ces traits fins, plus fins encore que ceux de leur congénères du clan de Dana, ces pomettes saillantes, ces traits droits et sévères, ces sourcils arqués...
Les bijoux qui ornaient leurs cheveux, leurs cous ou leurs poignets semblaient de glace.
Ils étaient vêtus de fourures ou de plumes, si bien qu'on se doutait que ce devait être des chasseurs.
Elles ne voyaient pas d'armes sur eux, mais elle se doutait qu'ils devaient pourtant bien en avoir...

Et soudain, le souvenir lui revint tout en bloc: Tyahnaïl!
Ces elfes lui ressemblaient tant! Il est vrai qu'elle n'avait jamais su d'où il venait, le garçon semblant toujours éviter la question avec soin...oui, à présent elle comprenait: c'était un demi-elfe des contrées de l'Est!
Si c'était bien le cas, alors, elle comprenait pourquoi elle ne voyait pas les armes des êtres qui leur faisaient face: celles ci étaient entre les phalanges, attendant la moindre occasion pour en sortir, griffes mortelles de la longueur d'une main.

Mais loin de se laisser impressionner, Carmina se retourna:
_Peut on savoir qui vous êtes et pourquoi cet ordre? Devrions nous nous laisser massacrer?
L'elfe qui semblait diriger la troupe la jaugea avant de répondre, avec un accent certain, mais pourtant sans hésitation aucune:
_C'est plutôt vous qui massacrez nos bêtes! Ces Faïrts sont à nous, et ils ont pour mission de défendre la forêt, notre territoire, contre les intrus des sous-sols des montagnes, nos énemis. Nous sommes les Elfes Gris, seigneurs de la forêt, et des plaines. Notre reine, Dame Naïlyaj, nous a donné ordre de vous mener à elle.
Je suis le chef de la troupe de la Première Troupe des Chasseurs de la Dame, je me nomme Vaïlyaj. Et vous, qui êtes vous?

Carmina s'occupait de la griffure de Louxira en même temps qu'elle répondait:
_Un groupe d'explorateurs. Ni plus ni moins. Nous venons des terres d'Avalon, en dehors de la presqu'île. Voici Tran'k Eter, Commandant de la Milice, puis Ulfedr, Louxira et Midnight, tous trois sortis du camp de la Déesse Nyx, l'une des deux Déesses rêgnante sur Avalon avec sa soeur et rivale la Déesse Dana. Quant à moi, mon nom est Carmina, et je fais aussi partie de la Milice.

Vaïlyaj fit un signe de tête pour comprendre qui' avait comprit, puis leur fit signe de les suivre à travers a forêt.

Ils marchèrent longtemps jusqu'à un endroit où les arbres se firent plus espacés, mais aussi plus vieux encore, et là, dans les arbres, des passerelles visibles du bas témoignaient d'une cité suspendue.
Il grimpèrent des marches de branches sur l'arbre le plus vieux et le plus large et accèdèrent à une gigantesque bâtisse de branchages tréssés, invisible depuis le bas.
Ils y pénétrèrent à la suite de leur guide, qui s'agenouilla devant une litière ou une Elfe reposait avant de prendre place à ses côtés.
Manifestement, Vaïlaj était le maris de la Dame.
Et quelle Dame! Ses longs cheveux tressés blancs comme la neige, mêlé de mêches bleues comme la nuit ou grises comme le cel d'orage, étaient retenus par une coiffe de fleurs et de perles de glace.
Ses yeux de glace exprimaient toute la noblesse imaginable et ses traits étaient tellement fins et beaux qu'ils en devenaient douloureux, sur une peau plus pâle encore que celle de ses congénères...
Si pâle que Carmina se demanda si c'était vraiment voulu...La Dame était malade!
En effet, sa longue et très ample robe de soie grise comme le ciel d'orage avait beau la couvrir de la tête aux pieds, on devinait que sa largeur servait à dissimuler un corps queletique, et si les traits de Naïlyaj étaient si douloureux, c'est qu'ils étaient tout bonnement émaciés!
D'ailleurs, on sentait dans sa tenue, malgré les efforts évidents qu'elle faisait pour n'en rien laisser paraître, que la fatigue la tenaillait, et qu'elle était plus que lasse. Toutefois, son port de tête lorsqu'elle s'assit sur son lit à leur arrivée demeura impeccable.

La troupe salue la Dame, puis le regard de la guerrière croisa celui de la reine, et un échange silencieux se fit.
Carmina resterait quelque temps soigner Naïlyaj, en échange de quoi elle leur accordait son soutien. L'elfe savait que Carmina ferait tout pour réussir, et Carmina savait que le soutien de l'elfe leur serait précieux.

Puis la reine des Elfes Gris s'interessa au reste de la troupe, dont les plus jeunes semblaient mal à l'aise sous son regard de glace. Son regard s'arrêta sur Tran'K Eter, qui le soutint sans problème, et elle compris qu'il était le chef des opérations.

Occupée à admirer et saluer la Dame, obnubilés - et c'était compréhensible - par sa prestance et celle de l'assemblée, le groupe ne remarqua pas ce qui se passait quelques dizaines de mètres derrières eux.
Ce n'est que lorsqu'un hennissement sonore retentit que quelques elfes froncèrent imperceptiblement les sourcils. Quelques éclats de voix étouffés fusèrent dans le dos du groupe et, finalement, la haute silhouette d'un cheval s'avança derrière eux.

Gris pommelé, sa cavalière à moitié tournée sur sa selle vers les elfes qui la suivaient d'un pas vif en lui intimant , d'une voix calme mais impérieuse, de ne pas aller plus loin.
Elle leva les mains pour signifier qu'elle n'avait aucune intention de causer plus de trouble qu'elle ne venait d'en faire.

Puis elle se retourna face à la Dame, par la même occasion vers le groupe, et inclina respectueusement la tête en plaçant une main derrière sa cuisse et faisant le geste d'enlever une coiffe - salutation traditionnelle des cavaliers.
Elle déchaussa ses étriers et mit pied à terre, puis, bride en main, fit un pas en avant sans quitter du regard la Dame, et enfin prit la parole.

"_Permettez moi d'ajouter aux noms que vous venez d'apprendre celui de Darsha, également au service de la Déesse Nyx. Je vous prie de m'excuser de vous avoir interrompus."

Après quoi elle se dirigea de façon plus décontractée vers le groupe et souffla au commandant un "Désolée pour le retard, mais je n'allais pas manquer ça" avec une désinvolture tout à fait dans l'esprit imprévisible d'une voleuse.

Les retrouver n'avait pas été facile et elle avait tourné en rond dans la Taïga un petit moment avant de tomber sur leurs traces, mais elle n'avait plus de souci à se faire maintenant.
Enfin, sauf si elle avait créé un incident diplomatique avec les elfes, bien sûr...

Tran'k se demanda s'il n'allait pas bientôt ce faire "hara-kiri" si sa troupe de jeunes gens continuaient à se comporter ainsi. Ce n'était plus des explorateurs aguerris mais une bande de gamins de la maternelle. Alors à moins qu'il ne se soit trompé dans son post sur la place central et y ait écrit "voyage scolaire", il fallait sévir et remettre tout le monde dans le droit chemin.
Le Commandant se contenta de se frotter les tempes.
Puis s'impatientant il demanda alors :

"Dites, Naïl... Na... Dame Naïlyaj..." Se reprit le Commandant en remerciant au passage sa mémoire. "Les intrus des sous-sols... Ce sont des nains n'est-ce pas ?"

L'atmosphère sembla brusquement se plomber. Apparemment c'était bien de cette espèce-là dont ils parlaient. Se motivant pour faire face aux regards assombris des elfes en pensant à la fabuleuse bière naine, Tran'k reprit alors la parole :

"Et pourquoi nous faire venir ici, mis à part vous soigner ? Au passage, j'espère que Carmina ne le fait pas pour rien... Je suis un peu dur en affaires."

Consevant un visage impassible malgré le "culot" dont il faisait preuve. Le Commandant ne détourna pas le regard de celui de la Dame.

[[Carmina je te laisse prendre les commandes au sujet des elfes, vu que c'est toi qui a eu l'idée. U;u Si tu pouvais d'ailleurs éclairer ma chandelle à ce sujet sur la Chatbox ou par MP...]]

Ulfedr et la bête qui lui avait sauté dessus cessèrent leurs coups et morsures et s'éloignèrent l'un de l'autre, non sans regards haineux. Il lui semblait voir dans le regard de la bête une lueur d'intelligence.
Ulfedr reporta son attention sur les nouveaux arrivants. Des elfes. Ulfedr détestait les elfes. Il eut un regard de mépris pour les "oreilles-pointues" (ainsi les appelait-il) et croisa le regard d'un jeune guerrier elfe. Une férocité étrange dans ses yeux. Cela lui plût. Ca n'était pas des elfes commes les autres. Ceux-là semblaient plus fort et ne rechignerait pas d'attaquer au corps à corps. Tant mieux. Si la situation tournait mal, il pourrait affronter des adversaires à sa mesure.

Carmina approuva de la tête la tirade de Tran'K: elle n'en attendait pas moins de lui. L'affrontement muet des flammes du regard de Tran'k et des glaces de celui de la Dame sembla réussir l'exploit de faire tenir une éternité dans une seconde...
Finalement, Naïlyaj eut un sourire en coin, comme ironique.
_Tu me rappelles étrangement une personne, commandant...
La réplique eut l'effet d'un coup de tonerre dans la tête de Carmina.
Elle avait la certitude qu'elle savait à qui l'elfe pensait en disant ces mots. Elle aurait l'occasion de s'en assurer plus tard.

Mais la guerrière ne laissa rien paraître de sa surprise et la reine elfe ne parut se rendre compte de rien, et poursuivit:
_Toutefois je puis te donner deux choses utiles, qui je pense te rejouiront: _premièrement, une carte précise de la presqu'île. Et non pas ces vagues tracés que les gens d'Avalon ont consrvé et déformé aux cours des siècles. car, oui, je connus Avalon autrefois, avant l'arrivée des deux..."déesses".(On sentait nettement le mépris dans sa voix à la manière dont elle avait prononcé le titre.)
_deuxièmement, des renseignements sur les peuples et prédateurs des environs, car bien que vous semblez déjà informés de l'existence de nos rivaux les nains, je dirait que, aux vues de votre ignorance sur notre propre existence et sur celle des Faïrts qui vous ont attaqués, vous ignorez une grande partie des choses bonnes à savoir...si vous comptez survivre.

Tran'k parut songeur sur l'offre. Inutile d'avoir le regard perçant de la Dame ou celui connaisseur de Carmina pour le voir.

_Je vous aurait bien proposé l'aide de mes Chasseurs, mais si jamais vous rencontrez des nains, ce serait comme signer votre propre arrêt de mort. Et je pense que vous ne comptez pas négliger une seule des...découvertes locales qui s'offrent à vous.

Bien sur, l'elfe Grise avait compris que le groupe n'était pas là uniquement pour faire du tourisme mais qu'il y avait là égallement -et surtout- des enjeux politiques et économiques, aux prix d'alliances avec les otochtones et d'exploitation des richesses locales.
Carmina eut le sentiment qu'elle n'était pas à sa place dans tous ses paniers des crabe...mais de toute manière, son soucis était autre, et tandis que la Dame parlait, elle était déjà en train d'établir son diagnostic et de passer en revues toutes les plantes et recettes qu'elle connaissait...Tout en soupçonnant déjà -à son grand désaroi- la nature du problème.

Puis, tandis que les négociations continuaient, Carmina déplaça son regard légèrement sur la gauche pour observer le maris de la Dame: guerrier, fier, dangereux mais...discret.
Son regard circulla dans la pièce et elle comprit aussitôt la singularité des Elfes Gris: c'était une société matriarche!
Les femmes semblaient toutes occuper les plus hautes fonctions intellectuelles, tandis que les hommes semblaient tous être cantonnés à des groupes de Chasseurs.
Toutefois il reignait une paix entre les deux sexes: les femmes ne méprisaient pas les hommes, et les hommes n'étaient par ailleurs pas des faire-valoir ou des esclaces. Leurs fonctions étaient juste différentes, mais tous étaient vitaux au on fonctionnement de la société.
Carmina y vit la ressemblance avec les félins à plume que ce peuple élevait: en effet, elle avait remarqué que les femelles Faïrts étaient plus grosses, plus belles et plus rares que les mâles. [[ l'inverse de nos amis machos les lions qui se réservent la plus grosse part dans la chasse des lionnes]]
Elle se demanda si cela était vraiment lié au hasard...

Tran'k considéra avec attention l'offre avant de croiser les bras. Reportant son attention sur la Dame au regard de glace.

"Bien. Je me vois mal refuser de telles offres alors que nous possédons aussi peu d'informations sur cette partie de ce territoire."

Puis s'installant en tailleur face à la dirigeante, il reprit la parole :

"Je vous écoute."

Carmina se demanda vaguement combien de temps il serait rester à vivre à la Dame sans son aide...un mois? Peut être deux vu la résistance apparente de la race.
Le temps de rêgler quelques affaires administratives avant de rendre l'âme...et de choisir une successeuse à sa charge.

La Dame fit un signe à l'un de ses fils qui sortit de la salle avant de revenir presque immédiatement avec un paquet enveloppé de parchemins dans les mains. Il le tendit à Tran'K qui tira sur les ficelles du paquetage pour découvrir un épais volume relié de cuir qu'il feuilleta négligement.
_Comme vous pouvez le voir, commandant, il s'agit là d'une carte de la presqu'île et de tout le reste du continent. Chaque partie est détaillée sur une page, avec les différentes espèces et peuples que l'on puit y trouver. Cela est précieux, d'autant plus qu'il fut offert par ma propre personne, il y a de cela de siècles et des siècles, à destination de son fils lorsqu'il partit dans les terres d'Avalon pour raisons diplomatiques...il ne revint malheureusement jamais, et ce furent ses compagnons d'armes qui rapportèrent ses restes brûlés et ses affaires à sa pauvre mère.

Plus le moindre doute. Carmina compris enfin l'histoire, remplissant les zones d'ombre par les dires de l'Elfe Grise, qui ne se doutait pas de qui elle était . Qui, de toute manière, ne pouvait pas s'en douter.

_Je vous recommanderais la plus grande prudence avec les nains. Ce sont des êtres bornés et colériques...on ne sait jamais ce qu'ils ont derrière la tête, et on ne peut se fier totalement à eux...enfin, ceci est mon avis, et j'avoue qu'il n'est pas totalemet neutre.

Devant la mine dubitative de Tran'K, la Dame comprit qu'il était inutile d'insister d'avantage sur le sujet: il verrait par lui même bien assez tôt. Elle préféra changer de sujet.

_Nous vous invitons à passer la nuit parmis nous, si vous le désirez...vous affronterez les plaines bien assez tôt, il serait stupide de passer la nuit au froid et aux prédateurs inutilement. Carmina restera donc avec nous quelques jours, le temps de rêgler nos...problèmes, puis elle vous rejoindra en route si elle le souhaite.

"Je tiens compte de vos remarques. Même si je préfère juger cela de mes propres yeux."

Tran'k referma le livre avant de se lever pour incliner d'un geste bref la tête.

"Je vous remercie pour ce livre et pour votre hospitalité. Nous acceptons votre proposition avec plaisir."

Puis rangeant précieusement l'ouvrage dans sa sacoche, il se tourna vers son amie d'enfance :

"Je veillerai à te laisser des marques de notre passage lorsque nous repartirons demain."

_Ne t'inquiète pas...je saurais me débrouiller, au pire, répondit Carmina

Elle se tourna vers la reine:

_Je suis prête à me mettre à vos services sur le champ, ma Dame.

La Dame aquiesça en silence avant de faire signe à deux gardes:

_Montrez leurs appartement pour la nuit à nos invités et servez leur de quoi se substanter, je vous prie. Je vous souhaite la bonne nuit, voyageurs...

Et sur cette réplique par la quelle elle venait de congédier ses hôtes, la Dame attendit qu'ils soient sortits,puis tira un rideau devant sa couche avant de se tourner vers Carmina, qui était demeurée à ses côtés.

_Alors, qu'en pensez vous?
Elle paraissait bien plus fragile, tout d'un coup, comme si la carapace qui lui servait à dissimuler sa maladie face aux voyageurs se brisait dans l'intimité d'un cercle plus fermé, composé uniquement de son maris, de Carmina et d'elle même.
La guerrière comprit que l'elfe ne parlait pas de son deal avec le commandant mais bien de sa maladie, et ne put que lui répondre en toute sincérité:
_Qu'il va falloir jouer serré.
Un silence pesant s'abattit alors sur elles, jusqu'à ce que Carmina ne finisse pas le rompre.
_J'ai toutefois déjà rencontré cette maladie chez les nomades du Désert de l'Est, et ai réussis, après bien des peines et des pertes, à la soigner. J'ai consacré mes dernières semaines à paufiner le remède et je pense que je devrais vous avoir guerrie d'ici une semaine.
Mais comprenez bien que je ne peux rien vous promettre: je n'avais jamais rencontré cela auparavent, et je ne comprend pas comment vous avez pu attrapper une maladie dont les seuls cas que j'ai connus évoluaient dans un environnement si...différent du votre.
Je vous propose de commencer dès maintenant le traitement, si vous le permettez.

L'Elfe Grise se contenta de faire un signe de tête et ferma les yeux, lasse, avant de s'allonger.
Son époux embrassa son front avant de se retirer pour les laisser seules.
Carmina remarqua qu'il n'avait aucun signe de maladie. Ce ne devait donc pas être contagieux...Ou du moins pas virale.
Elle sortit ses onguents et ses potions, et commença le chant.

» Dans les profondeurs [P][X]