Le retour de Carmina [X]

Carmina se laissa glisser à terre, contre le tronc d'un saule blanc. Elle était rentrée la veille dans la nuit, et sa fatigue se faisait ressentir. Son voyage avait duré une semaine de plus que prévu...Même une semaine et demie. Elle y avait passé presque un mois.
Mais c'était nécessaire.
Elle avait du sortir des terres d'Avallon, chose qu'elle n'avait pas fait depuis fort longtemps...
Elle était partie dans le sud-Est, traversant le désert, rencontrant au passage certains monstres et animaux locaux (allant du simple renard des sables, ou fennec, aux Athandras qui heureusement ne l'avaient pas attaquée, en passant par des reptiles et oiseaux plus ou moins simpathiques). Elle s'était jointe à une caravane de nomades qu'elle avait soigné d'une maladie jusqu'alors iconnue, des nomades comme d'elle même, et dont elle avait du étudier les symptomes et les effets, ainsi que les cadavres, avant que de pouvoir trouver un bon antidote, et surtout, associé à un bon chant de pouvoir. La traversée du désert avait duré une semaine à l'aller...Une fois arrivée dans les montagnes qui avaient vu son enfance, ou plutôt les hautes collines herbeuses, elle était retournée dans le village de son clan...Qui, malgré cinq siècle d'absence, était toujours debout, bien qu'évidement quelque peu différent de ses souvenirs. Mais pas tant que ça, les traditions et les ancêtres étant bien ancrées dans les lieux. Son arrivée avait fait son petit effet...en tant que chef légitime du clan.
Sa famille était la noblesse des lieux, émigrée quelques temps à Avallon pour rêgler des affaires administrative et commerciales, ils y avaient été décimés lors de la bataille de Petralk. Ils avaient laissé un branche secondaire de la famille gérer le clan, qui, à la nouvelle de la mort de la famille de Carmina, était devenue la nouvelle branche principale. Ils ignotaient qu'il y avait eut une survivante.
Une survivante qui, du fait de ses pouvoirs, avait vécu à travers les siècles.
Elle n'était pas la plus vieille du clan, loin de là, le clan entier possédant des pouvoirs.
Mais elle n'était pas venue pour réclamer sa place en tant que chef, dont de toute manière elle ne voulait pas. Elle était venue pour réclamer des réponses, et revenir à ses racines.
Son arrière grand oncle, l'actuel chef de clan, avait répondu à ses questions, et elle avait pu redécouvrir tout le reste de sa famille, qu'elle n'avait plus vu depuis ses quatorze ans, âge à partir du quel elle était partie du village, suivant son arrière grand mère, avec ses parents, grands parents, et sa petit soeur.

Peu de choses avaient changée, peu de gens étaient apparus: le clan entier ayant des pouvoirs très forts, et du fait du milieu égallement, on faisait peu d'enfant, car on vivait (très très) longtemps (arrière grand oncle = le quadruple de l'âge de Carmina, à peu de chose près).
Puis, une fois qu'elle eut trouvé ce qu'elle cherchait plus que des réponses ou ses racines (qui lui avait mis du temps d'ailleurs, car il avait fallu chercher dans ses connaissances et souvenirs pour trouver l'endroit où il avait été caché), elle était partie. le retour avait mis deux jours: on éduquait dans son village des faucons, pigeons et oiseaux -certains grands comme des chevaux- qui transportaient de la simple missive pour les plus petits aux personnes pour les plus gros, puis revenaient toujours au clan.

Et à présent qu'elle était revenue, elle examinait l'objet de son voyage: un bâton de bois, polis par les siècles, avec pour unique décoration des gravures dorées, dans l'écriture de son clan, ainsi que le signe du clan: les quatres croissants de lunes disposés comme les feuilles d'un trêfle à quatre feuilles...le Clan des quatres Lunes.
Elle était la dernière représentante de la branche de la Pleine Lune, la lune tournée vers le haut.
C'était la Lune Vieillisante, ou le croissant de lune tournée vers la droite, qui avait repris la tête du Clan.
En suite venait la Lune Noire, tournée vers le bas, puis la Lune Croissante, tournée vers la gauche.
Elle était de nouveau la chef de clan officielle. Mais en raison de son absence, elle avait délaissé la responsabilité du Clan à son arrière grand oncle.

Elle regarda autours d'elle d'un air las, puis grimpa dans le chêne qu'elle aimait tant et replongea dans ses pensées...

Tran'k passait par là -non cette fois-ci il ne courait pas à la chasse aux papillons mais avait tout simplement eut la curieuse envie de passer par là justement- lorsqu'il s'arrêta dans le cloître préféré de Mimi. En effet, en son centre trônait un magnifique chêne dans lequel avait l'habitude de grimper la jeun... Hem, la guerrière.
Se rappelant alors que son amie avait dû partir en urgence pour des régler des affaires personnelles, il eut un éclat de génie et décida de vérifier si la gardienne du temple était bien de retour. Omettant le fait que, particulièrement éreintée par son voyage, la damoiselle ne se fasse violence si elle était réveillée. Pouvons nous appeler cela du courage ? Non, ceci était comme d'habitude, un acte guidé par la stupidité innocente du Commandant.
Aussi comme à son habitude, il alla gaieme... Bref, de sa démarcha sautillante, jusqu'à l'immense arbre au feuillage aussi dru que les poils de Tante Isabelle. Ce qui -au passage- le fit un eu frissonner d'horreur. Cependant, il se reprit avant de se planter devant le tronc pour lever la tête et interpellait la jeu... son amie.

"Ooh ! Mimi ! T'es rentrée de ton voyage au pas ? C'était bien ?"

Carmina ouvrit un oeil. Puis l'autre. Il n'y avait qu'une personne au monde pour la réveiller sur ce ton joyeux et naïf...Elle retint un soupire et se pendit comme à son habitude tête en bas, dévisageant le commandant d'un air inexpressif.
_Bonjour Tran'k...Oui, comme tu peux le voir, je suis rentrée, et je ne sais si c'était "bien" mais ce fut pour le moins...interessant. J'ai trouvé ce que je cherchais, et plus encore.
Elle haussa les sourcils, puis reprit:
_Quand à toi, à ce que je puis constater, tu es toujours aussi...fidèle à toi même, mon chou.

Tran'k eut un sourire niais avant de se passer une main sur la nuque, ne sachant comment prendre la dernière phrase. Reproche ? Compliment ? Il haussa les épaules, décidant de choisir une réponse qui s'appliquerait dans les deux cas. Ce que, oui, il savait faire de temps à autres. Quand il n'y avait pas de papillons dans le coin surtout.

"On fait comme on peut."

Puis, sa curiosité -toujours pure et innocente, c'était ça le pire- éveillée par les propos de la je... Non, nous avons déjà dit que nous l'appellerons guerrière. Donc, les propos de la guerrière ayant éveillé sa curiosité, il releva les yeux vers Carmina dans l'espoir de pouvoir la questionner un peu -ajoutons aussi qu'il s'ennuyait mortellement en ce moment et que, pour une fois, ses actes n'étaient pas dictés par le plaisir malsain d'embêter son monde-.

"Tu as trouvé ce que tu cherchais ? Quoi, si ce n'est pas indiscret ? Une paire de nouvelles chaussures ? Une arme destructive ? Un filet à papillons ?"

Puis prenant une expression plus sérieuse, haussant légèrement un sourcil :

"Un objet précieux à tes yeux ?"

_Oui. Tu verras bien lors de la prochaine bataille.Non. Oui, bien que l'on dirait plutôt destructrice, mon chou. Non. Oui.

Le bâton de Carmina était du genre difficile à cacher, au vue de sa taille (aussi grand qu'elle même) mais elle l'avait rangé dans son carquois, aussi prit-elle un malin plaisir à répondre de manière évasive. Et puis, elle préférait prendre le temps de l'aprivoisier avant de le montrer, on n'était jamais trop prudent, surtout avec Tran'k.

_Sinon, qu'as tu fait de beau durant mon absence? Comment va Lulu?

Tran'k comprenant qu'il ne tirerait malheureusement plus rien de la guerrière, abandonna ses questions. Devant celle de Carmina, il resta songeur pendant plusieurs minutes de silence -remarque : il faut être patient avec Tran'k-, avant de se décider à répondre.

"J'ai attrapé un papillon couleur or... Très joli d'ailleurs ! Je me suis empressé de le faire flamber ! Sinon je vadrouille un peu partout... Je pointe mon nez un peu vers la Presqu'île... Ca me paraît vachement intéressant. Je suis aussi retourné à Petralk terminer le ménage en extérieur sans m'enfoncer plus. Je me suis tapé un Prince du Chaos... Saleté de bête je peux te l'assurer, il m'a brisé la plupart de mes os de gauche. Heureusement que je suis assez endurant et que j'avais Lulu... Ah ! D'ailleurs Lulu..."

Le Commandant enleva sa veste, laissant le tissu glisser vers le bas encore rattaché par la ceinture, dévoilant le débardeur noir qu'il portait en dessous. Tirant légèrement celui-ci vers le haut, il laissa alors apparaître une partie de l'immense cicatrice traversant son ventre en diagonale. Se rhabillant prestement, il eut une légère moue gêné tentant de minimiser la blessure, avant d'annoncer :

"Petite colère passagère... Je ne la referai pas."

Carmina haussa de nouveau les sourcils: elle s'absentait quelques jours et il trouvait le moyen de se faire mal.
Elle fouilla dans son carquois, et en tira une fiole teintée au contenu verdatre
_Tiens, trois gouttes gouttes de ça pour deux cuillères d'eau, sur linges humides, en pansement pendant trois jours. Histoire que ça cicatrise mieux que ça, parce que là, c'est pas jolis à voir. Et qu'as tu fait pour la mettre dans une pareille colère?

Tran'k ne put que prendre la fiole alors que Carmina la lui mettait d'office dans la main, n'admettant aucune réplique. Le Commandant eut un sourire niais avant de la ranger dans sa sacoche.

"Oui, Maman."

Puis reprenant son sérieux à la question de la guerrière. Il eut un pauvre sourire, détournant la tête, le regard dans le vague.

"Un truc stupide..."

Avant de se retourner vivement vers Mimi, souhaitant ne pas s'appesantir sur le sujet. Cette fois, un véritable sourire niais se peignit sur son visage alors qu'il prenait le même air stupide habituel.

"Tu sais très bien qu'on dit toujours que si je suis la force de notre duo, Lulu en est la tête ! C'est pas bien grave... Oh et justement je parlais de la Presqu'île à l'Est d'Avalon ! Je vais certes partir un peu la semaine prochaine mais, pour plus tard, si ça t'intéresse, je pense que je vais aller traîner mes guêtres là-bas..."

_Bonne idée...Je t'accompagnerais bien, ça fait un moment que je regardais cette partie de la carte avec curiosité...Il s'agit là encore de me donner une date et un lieu de rendez vous, lorsque tu les auras, et je te dirais si je puis t'accompagner.

Carmina sembla songeuse un instant, comme égarée dans ses pensées.

_Ha oui, et, où que tu partes, ne provoque pas Lulu, je ne voudrais pas avoir à te recoudre, capish?

Tran'k acquiesça.

"Oui, dès que je les aurais. En fait, je pense te les dire dès que je rentrerai de ma semaine de déambulations... Et j'aimerai aussi partir un peu avec d'autres personnes... Bref, à voir."

Puis hésitant quelques instants, il reprit :

"Ne t'inquiète pas pour Lulu... Je ne sais pas trop de toutes façons si elle voudra partir alors... Enfin, il ne devrait pas y avoir de problèmes spéciaux... Sauf au niveau des rencontres. Je n'ai aucune idée de quelle genre de créature se trouve là-bas... Mais on ne va pas se plaindre, depuis le temps que je pourris à la milice."

Le Commandant eut un sourire, surement plus intéressée par les combats encore que la véritable exploration, quoi que celle-ci est pu réveillée sa curiosité.

"Je me demande qui on pourrait emmener avec nous... Si ça ne te dérange pas ? Pas spécialement que je crains les affrontements... Mais il vaudrait mieux."

_Qui emmener avec nous? Les forts, les courageux et les suicidaires. Le mieux étant ceux qui ont les trois. Bref, les volontaires. Je pense qu'ils ne devraient pas trop manquer...Les jeunes sont de moins en moins attachés à leur survie, de nos jours.

Carmina s'arrêta: voilà qu'elle parlait comme une grand-mère, à présent...

_Enfin, quoi qu'il en soit, ça me laisse le temps de faire ce que j'ai à faire avant de repartir.

Tran'k eut un nouveau hochement de tête. Il est vrai qu'ils paraissaient être jeunes et pourtant, leurs esprits eux, avaient bien 500 ans passés. Et de temps à autres, cela se faisait ressentir, même chez lui quoi qu'on puisse en penser.

"Faire ce que tu as à faire ? Je suppose que je n'ai pas droit à d'autres précisions... C'est pas bien grave j'ai l'habitude. Je me suis fait une raison à force !"

Et d'une main distraite il essuya ses fausses larmes, prenant un air indigné au plus haut point.

Carmina haussa les épaules: elle ne voulait pas le froisser, elle préférait juste garder la discretion sur ce qu'elle faisait.

_Si ça peut te réconforter, un partie de "ce que j'ai à faire" consiste à experimenter de nouvelles recettes de plantes et à perfectionner l'antidote pour les nomades du désert, qui ne me satisfait pas pleinement...

"Ah... Je suppose cela passionnant."

Tran'k ne cacha pas son peu de connaissances sur le sujet. Comprenant bien qu'il n'obtiendrait plus rien, il eut un soupir de frustration avec de hausser les épaules. Ma foi, chacun ses secrets n'est-ce pas ?

"Bon, je vais y aller... Sinon Hana va me tirer les oreilles parce que je ne me serai pas occupé des papiers à la milice...Et je dois encore réparer ce pauvre bureau qui est le mien. On se revoit dans une semaine donc."

Carmina grimpa dans les plus hautes branches du chêne, et regarda le commendant s'éloigner de sa démarche non chalante jusqu'à la sortie.
Elle ressortit son bâton et se plongea dans la lecture des caractères dorés, qui n'apparaissaient que lorsqu'elle l'avait en main. Une écriture différente de celle en cours à Tirn Aill, élancée, compliquée, penchée...Une écriture propre au Clan.

Bien. Très bien...
C'était bien ce qu'elle craignait.

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